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Stéphanie Bataille: «Je réclame un retour à l’humanité»
ENTRETIEN - À la mort de son père, qui a contracté le Covid-19 à l’hôpital, elle porte plainte contre X pour homicide involontaire et lance une pétition pour que les familles puissent visiter leurs proches.

Stéphanie Bataille est comédienne et directrice du Théâtre Antoine, à Paris. Son père, l’acteur Étienne Draber, est décédé après avoir contracté le Covid-19 à l’hôpital, le 11 janvier dernier, à 81 ans. Sans qu’aucun membre de sa famille n’ait pu venir le soutenir, sauf «au dernier moment», comme l’ont exigé les médecins. «Mon histoire, c’est votre histoire!, alerte-t-elle. Ma mission est une mission nationale.»Aujourd’hui, comme en témoigne l’adresse e-mail qu’elle vient de se créer - stephaniebataillepourvous@gmail.com -, elle veut «tout mettre en œuvre pour rétablir cette liberté fondamentale d’aller visiter les patients dès le premier jour d’hospitalisation».
LE FIGARO. - Qu’est-il arrivé à votre père?
Stéphanie BATAILLE. - Il est entré à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière le 13 décembre, pour une intervention en cardiologie. Testé négatif au Covid. Il respectait les gestes barrières à la lettre depuis le début du confinement ; je n’avais pas embrassé mon père, ni ma mère d’ailleurs, depuis fin février 2020. Après l’opération, qui s’est bien déroulée, on a pu le voir tous les jours. Mais bientôt il commence à avoir une petite toux, des maux de tête. Le 19, on nous avertit qu’il est en train de faire un AVC. Je remarque que sur la porte du patient d’à côté, il y a écrit: «Attention Covid». Malgré notre insistance, on ne lui fera un test que le 24. Qui s’avère positif. «Désolé, nous dit le chirurgien - comme nous diront finalement tous nos interlocuteurs -, on a eu douze cas de Covid parmi le personnel soignant, on n’a personne pour les remplacer.»Aussitôt testés, ma mère, mon frère et moi sommes négatifs.
Le 30, mon père est transféré en unité Covid. Et là, la machine infernale se met en marche. Figurez-vous que dans ce pavillon Marguerite-Bottard, il n’y a pas de gel hydroalcoolique, personne pour vous prendre la température, ce qu’on fait pourtant dans les théâtres et les musées! Les patients sont «parqués», derrière une porte coupe-feu avec un digicode. «Vous ne pouvez pas rentrer. Vous le verrez au dernier moment», nous assène-t-on. Ce serait trop de travail de vous habiller, nous répond-on, même quand on propose d’acheter une tenue. Nous nous rendons tout de même quotidiennement à l’hôpital, pour lui déposer des repas et des petits mots d’encouragement. On n’a le droit de se parler que par l’intermédiaire d’une tablette… Une demi-heure par jour, sauf le week-end.
Votre père est «mort de chagrin», dites-vous…
À l’hôpital, on appelle ça, cyniquement, «un glissement». (...)
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